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Promaslist présente: Workwear, un style français pr Frédéric Martin-Bernard

Épicentre de la mode masculine, la Fashion week française permet de découvrir sans cesse de nouveaux stylistes. Focus sur des nouveaux talents établis au pied de la Tour Eiffel.

FRÉDÉRIC MARTIN-BERNARD

Ça c’est Paris ! Six jours durant, à quelques encablures l’une de l’autre, mille et cent marques peuvent se produire et rayonner, chacune dans son genre, avec des collections diverses et variées qui ont pour point commun de cibler un même public. Cette diversité est moins vraie à Milan où la plupart des propositions sont développées en tandem avec des industriels, dans le but de les produire, les distribuer et les vendre en grande quantité. A Paris, l’offre est plus éclectique à bien des niveaux. On trouve tous les styles, toutes les nationalités, toutes les échelles. Il y a, à la fois, Louis Vuitton, leader mondial du luxe, qui orchestre un show monumental dans la Cour Carrée du Louvre, ambiancé par la chanteuse latino Rosalia (aux quelque 23 millions de followers sur Instagram) qui se produit en live et vole la vedette aux vêtements, et des jeunes designers inconnus qui ont du talent, de l’énergie et de l’originalité à revendre. Paradoxalement, la Covid a pour conséquence qu’ils sont plus nombreux qu’avant la pandémie. Du moins, cette dernière n’a pas coupé l’envie de se lancer à des stylistes, de façon quasi confidentielle dans un premier temps. Aujourd’hui, ces nouveaux noms (avec quelques saisons d’existence) se révèlent matures. Sur les entrefaites, ils ont peaufiné leur collection, affiné leur concept, musclé leur discours. A leurs côtés, d’autres font aujourd’hui leurs premiers pas sur l’automne-hiver 2023-2024. Eux aussi ont tiré profit de cette période de remise en question. Leurs galops d’essai sont particulièrement bien ficelés. Focus sur plusieurs d’entre eux.

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Des variations sur le

Le propos de Jeanne Friot opère comme une claque. C’est un manifeste. Avant que la première silhouette de sa nouvelle collection ne s’avance, une voix off lit des passages du livre Les Guérillères de Monique Wittig. La jeune française entend dénoncer ce qui se passe en Iran, en Italie ou encore aux Etats-Unis à propos du vote de lois antiavortements. Il y a quelque chose de feue Vivienne Westwood dans sa démarche. Également du Westwood dans son style plutôt punk, dominé par un rouge écarlate pour des tartans, de la fourrure, des résilles, du cuir, de la maille, du vinyle, souvent recyclés, dont elle habille les hommes en jouant sur les volumes, le long et le court, l’ample et l’ajusté. Sa proposition ne s’embarrasse plus des questions de genre. Normal : le sujet est dépassé pour les jeunes générations.

Jeanne Friot

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Pierre François Valette compose également avec le masculin/féminin pour sa marque Valette Studio. L’hiver prochain, il s’inspire de Françoise Sagan, de sa frêle allure de garçon manqué, de ses habits favoris chipés aux hommes qu’il assouplit, découpe, évide, raccourcit, crible de clous. Il retravaille aussi les blouses en mousseline fragile de l’auteure de Bonjour Tristesse qui deviennent des chemises délicates pour homme et, pourquoi pas, aussi, des robes. La proposition de cet ancien de l’École de la Chambre Syndicale, passé par les studios d’Isabel Marant et de Saint Laurent à l’issue de ses études, s’est considérablement étoffée depuis la saison passée. Musclée, aussi. C’est un nom à suivre et à retenir.

Valette Studio

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Le défilé de Steven Passaro est également une bonne surprise, un exemple de relève française. L’hiver prochain, il s’inspire des tirages de la photographe allemande Caroline Koenigs pour des imprimés comme des vagues qui animent les mailles d’un pull, décorent une chemise, traversent une veste de laquelle s’échappent des plissés comme des ailes au niveau de la poitrine. La collection compte une vingtaine de silhouettes d’inspiration tailleur, plutôt formelles sans être classiques. Une maîtrise supérieure de la coupe est flagrante, sachant que ce styliste a pris le parti de mettre au point ses modèles à l’aide de logiciels qui les développent en 3D, plutôt que de recourir aux méthodes traditionnelles de modélisme qui réclament de nombreux essais, toiles et prototypes.

Steven Passaro

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de mieux en mieux

Entre la Fashion week de juin 2022 et celle pour l’automne-hiver 2023-2024 qui s’est achevée le week-end dernier à Paris, nombreux sont les jeunes marques qui ont fait un grand pas en avant. Le label parisien REM - derrière lequel se cachent Andres Azubel et Sebastian Lundin qui ont précédemment travaillé pour des grandes maisons (Balenciaga, Givenchy, Saint Laurent, Maison Margiela…-, twiste les archétypes de l’habillement masculin. Les volumes de chemise sont désaxés. Les pantalons aux jambes arquées sont rehaussés des découpes et des surpiqûres des charpentiers, inversées dos et devant. Des poches et des détails en trompe l’œil ajoutent de l’originalité à ce dressing sous influence streetwear.

REM

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Frédéric Llosa, lui, creuse le sillon d’un dressing Llosa à la fois inspiré de l’habillement traditionnel japonais et du sportswear qui est son domaine de prédilection. Sa nouvelle proposition est épurée par rapport à l’initiale. Il y a moins de détails rapportés. Certaines matières ne proviennent plus de stocks dormants. Elles ont été sourcées chez des tisseurs spécialisés afin de ne plus être limités dans les quantités de production.
Repéré en juin dernier, Recoded by Alto multiplie également les bonnes pièces tout en restant fidèle à son concept de réinterpréter des vêtements existants. Ces derniers sont morcelés, assemblés à d’autres, surimprimés d’une façon qui ne fait pas du tout artisanal. La réalisation est très aboutie, moderne.

La collection de la marque Erevan s’est tout autant musclée et développée depuis la dernière fois. Est-ce lié à l’inauguration, rue des Saints-Pères à Paris, d’une deuxième boutique (après Saint-Tropez) qui confronte un peu ses fondateurs aux réalités du marché ?

Tout au long de l’année 2022, Drôle de Monsieur a aussi tiré des enseignements de son pop-up store dans le Haut-Marais. Ce magasin temporaire a prolongé son bail précaire à plusieurs reprises. Il a tout de même fini par fermer et sera prochainement remplacé par une boutique permanente (à l’angle de la rue Charlot et de la rue de Poitou) qui accueillera la collection de l’hiver prochain jouant la carte du sport vintage de façon plus subtile.

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prometteurs

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Charlotte Lionnard a roulé sa bosse avant de se lancer sous son nom Lionnard, avec l’intention de développer « un glamour masculin ». Designer textile de formation, elle a travaillé pour des stylistes émergeants à Londres, avant de poursuivre sa carrière à Copenhague, puis à Paris aux côtés des deux designers du label Botter qui assuraient alors la direction artistique de Nina Ricci. Aujourd’hui, elle exprime sa passion pour les matières à travers des étoffes ouvragées, des soies brodées, des imprimés à la main qui sont travaillés de pied en cap pour des silhouettes citadines aux volumes amples, bien balancés.

Lionnard

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Quelque chose accroche également l’œil dans la proposition sportswear de Basile Dadaux griffée Again. Passé par deux écoles de mode à Lyon et à Paris, avant d’effectuer un stage de six mois chez Jean Paul Gaultier à la Haute Couture, et de travailler pendant deux ans et demi chez Hermès sur le sporstwear et le cuir au département féminin, ce natif du Jura s’est lancé la saison passée dans la mode homme en n’écoutant que son intuition et sa grande passion pour la nature, les sports actifs en plein air. Tous ses modèles sont taillés dans des matériaux choisis, souvent techniques. Leurs détails fonctionnels sont détournés à bon escient de l’outerwear. Et non pour surjouer un style. Again se veut à la fois pratique, sobre et enlevé.

Again